Le premier magazine féminin en féroïen s'intitulait Oyggjarnar (Les Îles) et fut publié de 1905 à 1908. Sa rédactrice en chef était Súsanna Helena Patursson (1864-1916), fille d'Elin et de Páll à Kirkjubøur et sœur de personnalités nationales telles que Sverre, Gazet, Siggert et surtout Jóannes Patursson. Jeune femme, Súsanna Helena s'installa à Copenhague, où elle apprit la couture et le piano, avant de devenir secrétaire juridique. En 1896, elle cofonda l'Association pour le progrès des femmes féroïennes afin de protester contre l'exclusion des femmes de l'Association féroïenne. L'année suivante, l'association modifia ses statuts, ce qui entraîna l'adhésion de 24 femmes, ce qui entraîna sa dissolution.
En 1904, Súsanna Helena Patursson retourna aux Îles Féroé. Pendant les trois années de parution d'Oyggjarnar, elle a édité et rédigé elle-même la majeure partie de son contenu. Le magazine a débuté comme hebdomadaire, puis est devenu bimensuel, proposant des articles et des publicités sur quatre pages.
À l'époque, la pêche devenait une industrie lucrative aux Îles Féroé, ce qui remettait en question les idéaux traditionnels des femmes dans la société agraire. Oyggjarnar défendait l'éducation des femmes, le droit de vote et l'amélioration de l'habitat, soulignant que chacun – et pas seulement les hommes et les garçons – avait besoin d'une alimentation nutritive. Le magazine publiait des recettes de nouveaux plats et des articles sur la culture de légumes adaptés au climat féroïen.
Au lieu de se concentrer sur les rôles traditionnels comme garder les vaches, travailler la laine et confectionner des vêtements, le magazine faisait de l'entretien ménager une tâche centrale. Les maisons devaient être propres et nettes, et proposait des conseils sur la façon dont les rideaux et les tapis pouvaient rendre le salon confortable. Cependant, le magazine rejetait non seulement les rôles traditionnels des femmes rurales, mais critiquait également les nouveaux rôles professionnels des femmes, celles de « poissonnières » et de « pêcheuses », les avertissant qu'elles risquaient de perdre « leur grâce et leur pudeur ».
Súsanna Helena Patursson fut une pionnière non seulement dans le journalisme féroïen et la lutte pour l'égalité des sexes, mais aussi dans la littérature. Elle écrivit la première pièce jouée en féroïen en 1889, et parmi ses écrits inédits figurent deux longs récits sur un amour trahi et la vengeance. Ses recettes et articles sur l'amélioration de l'habitat furent compilés et publiés en 1907 et 1912, quelques années seulement avant sa mort.
Malan Marnersdóttir
